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À BORD DU SIMON-BOLIVAR.

au mécanicien ordre de balancer sa machine, ensuite aux mariniers d’avant et d’arrière ordre de larguer les amarres de poste. Tous ceux qui n’étaient pas du voyage, disséminés sur les étages de la superstructure, durent redescendre sur le quai. Enfin, après quelques bousculades, il ne resta plus à bord que les passagers et l’équipage.

Dès que le Simon-Bolivar se fut mis en mouvement, redoublement de clameurs, tumulte d’adieux, entre lesquels éclatèrent les vivats en l’honneur de l’Orénoque et de ses affluents. Le bateau à vapeur écarté, sa puissante roue battit les eaux avec violence, et le timonier prit direction vers le milieu du fleuve. Un quart d’heure après, la ville avait disparu derrière un tournant de la rive gauche, et bientôt on ne vit plus rien des dernières maisons de la Soledad sur la rive opposée.

On n’estime pas à moins de cinq cent mille kilomètres carrés l’étendue des llanos vénézuéliens. Ce sont des plaines presque plates. À peine, en de certains endroits, le sol s’accidente-t-il de ces renflements, qui sont appelés bancos dans le pays, ou de ces buttes à pans brusques, à terrasses régulières, appelées mesas. Les llanos ne se relèvent que vers la base des montagnes, dont le voisinage se fait déjà sentir. D’autres, les bajos, sont limitrophes des cours d’eau. C’est à travers ces immenses aires, tantôt verdoyantes à la saison des pluies, tantôt jaunes et presque décolorées pendant les mois de sécheresse, que se déroule en demi-cercle le cours de l’Orénoque.

Au reste, les passagers du Simon-Bolivar, désireux de connaître le fleuve au double point de vue hydrographique et géographique, n’auraient eu qu’à poser des questions à MM. Miguel, Felipe et Varinas pour obtenir des réponses positives. Ces savants n’étaient-ils pas toujours prêts à fournir de minutieux renseignements sur les bourgades, sur les villages, sur les affluents, sur les diverses peuplades sédentaires ou errantes ? À quels plus consciencieux cicerones eût-il été possible de s’adresser, et avec quelle obligeance, quel empressement, ils se fussent mis à la disposition des voyageurs !

Il est vrai, parmi les passagers du Simon-Bolivar, le plus grand