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DEUX MOIS À LA MISSION.

— Si vous me soignez… je ne mourrai pas… bien sûr !…

— Mais il te faut du calme…

— J’en ai, mon colonel ! Tenez… voilà le sommeil qui me reprend… et c’est du bon sommeil, cette fois…

— Dors, mon vieil ami, dors !… Nous allons revenir à Santa-Juana… La route ne te causera aucune fatigue, et tu seras sur pied dans quelques jours. »

Le colonel de Kermor s’était penché sur la litière, il avait posé ses lèvres sur le front du sergent Martial, et « son vieil ami » s’était endormi tout souriant.

« Mon père, s’écria Jeanne, nous le sauverons…

— Oui… ma Jeanne chérie… avec l’aide de Dieu ! » répondit le missionnaire.

Du reste, Germain Paterne et lui avaient examiné la blessure du sergent Martial, et il ne leur semblait pas qu’elle dût avoir des suites mortelles. On sut alors que l’assassin, c’était Alfaniz, qui avait frappé le vieux soldat au moment où celui-ci, dans un accès de fureur, s’était jeté sur lui.

Le Père Esperante dit alors :

« Aujourd’hui, j’entends que mes braves Indiens se reposent et aussi vos compagnons, monsieur Helloch, car ils en ont besoin… Demain matin, nous reprendrons le chemin de la Mission, et Gomo nous y guidera par le plus court…

— C’est à ce courageux enfant que nous devons notre salut… fit observer Jeanne.

— Je le sais », répondit le Père Esperante.

Et, appelant le jeune Indien :

« Viens, Gomo, dit-il, viens !… Je t’embrasse pour tous ceux que tu as sauvés ! »

Et, après être sorti des bras du Père Esperante, Gomo passa entre ceux de Jeanne qu’il continuait, dans son trouble, d’appeler : mon ami Jean !…