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LE SUPERBE ORÉNOQUE.

À cette époque de l’année, les crues n’avaient pas encore relevé le niveau de l’Orénoque. Il avait donc fallu traîner la Gallinetta et la Moriche à cinq kilomètres en aval, à l’embouchure d’un petit rio de la rive droite, où la profondeur de l’eau était suffisante. À partir de cet endroit elles ne couraient plus que le risque de s’engraver pendant quelques heures, et non celui de demeurer à sec jusqu’au début de la saison pluvieuse.

Le Père Esperante voulut reconduire ses enfants au nouveau campement. Le sergent Martial, entièrement rétabli, se joignit à lui, en même temps que le jeune Indien, devenu enfant adoptif de la Mission de Santa-Juana.

Une cinquantaine de Guaharibos leur firent escorte, et tous arrivèrent heureusement à l’embouchure du rio.

L’heure du départ venue, Valdez prit son poste dans la Gallinetta, où Jacques Helloch et sa femme devaient s’embarquer. Parchal reprit le sien dans la Morich, dont le rouf abriterait à la fois les précieuses collections de Germain Paterne et sa non moins précieuse personne.

Comme les deux falcas devaient naviguer de conserve, et le plus souvent bord à bord, Germain Paterne n’en serait pas réduit à sa seule société. Autant qu’il le voudrait, il tiendrait compagnie aux jeunes époux. En outre, — cela va de soi, — les repas se prendraient en commun à bord de la Gallinetta, sauf le cas où Jacques et Jeanne Helloch accepteraient une invitation de Germain Paterne à bord de la Moriche.

Le temps était favorable, c’est-à-dire que le vent soufflait de l’est en bonne brise. Les rayons solaires tamisés par un léger voile de nuages, rendaient la température très supportable.

Le colonel de Kermor et le sergent Martial descendirent au pied de la berge pour embrasser leurs chers enfants. Ni les uns ni les autres ne cherchèrent à se défendre d’une émotion bien naturelle. Jeanne, si énergique pourtant, pleurait silencieusement entre les bras de son père…