« Je te ramènerai à lui, ma chère Jeanne !… dit Jacques Helloch. Dans quelques mois, nous serons tous les deux de retour à Santa-Juana…
— Tous les trois… ajouta Germain Paterne, car j’ai dû oublier de récolter quelques-unes de ces plantes rares… qui ne poussent que sur les territoires de la Mission… et je prouverai au ministre de l’Instruction publique…
— Adieu… mon bon Martial… adieu, dit la jeune femme, en embrassant le vieux soldat.
— Oui… Jeanne… et pense à ton bonhomme d’oncle… qui ne t’oubliera jamais !… »
Puis, ce fut le tour de Gomo, lequel eut sa bonne part de ces embrassements.
« Adieu… mon père… dit Jacques Helloch en serrant la main du missionnaire, et au revoir… au revoir ! »
Jacques Helloch, sa femme et Germain Paterne embarquèrent dans la Gallinetta.
Les voiles furent hissées, les amarres larguées, et les deux pirogues suivirent le fil du courant, au moment où le Père Esperante tendait le bras pour leur donner une dernière bénédiction.
Puis le sergent Martial, le jeune Indien et lui, escortés des Guaharibos, reprirent le chemin de la Mission.
Il n’y a pas lieu de raconter étape par étape cette navigation des falcas à la descente de l’Orénoque. Le voyage, grâce au courant, exigerait trois ou quatre fois moins de temps et dix fois moins d’efforts, il présenterait dix fois moins de dangers que s’il se fût agi de remonter vers les sources du fleuve. L’emploi de l’espilla ne devint jamais nécessaire pour le halage des pirogues, et les palancas suffirent, lorsque la brise tombait ou devenait contraire.
Les passagers revirent alors comme dans un tableau mouvant les lieux par lesquels ils avaient déjà passé, — les mêmes villages, les mêmes ranchos, les mêmes raudals, les mêmes rapides. La crue commençant à se faire sentir, les falcas trouvèrent assez d’eau pour