Page:Verne - Le Volcan d’or version originale.djvu/89

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sonnel du Scout, il avait été au service de la Compagnie de la baie d’Hudson, servant de guide aux chasseurs de fourrures à travers ces vastes territoires. Il connaissait parfaitement le pays pour l’avoir parcouru dans tous les sens et même une partie de la région au-delà de Dawson-City, en descendant le cours du Yukon et jusqu’à la limite du Cercle Polaire.

Neluto, peu communicatif en somme, savait assez d’anglais pour comprendre et être compris. Du reste, en dehors des choses de son métier, il ne parlait guère, et comme on dit, il fallait lui tirer les mots du gosier. Ce n’est pas de lui que Ben Raddle et Summy Skim apprendraient grand chose relativement à l’exploitation des claims dans la région aurifère.

Cependant, cet homme, très accoutumé au climat du Klondike, pouvait être questionné avec profit à ce sujet. Aussi Ben Raddle lui avait-il tout d’abord demandé ce qu’il pensait du temps et s’il croyait que la débâcle des lacs fût prochaine.

Comme il ne se décidait pas à répondre, sans doute parce qu’un étranger l’interrogeait, Bill Stell intervint et lui réitira la question.

Neluto déclara alors, qu’à son avis, la fin des grands froids ne tarderait pas d’une quinzaine de jours, et qu’il n’y avait pas lieu de prévoir avant ni la fonte des neiges ni la débâcle des glaces.

De cette affirmation, il fallait nécessairement conclure que le bateau ne pourrait rencontrer d’eaux libres au début du voyage, à moins qu’il ne se produisit un brusque changement dans l’état atmosphérique, — ce qui n’est pas rare sous ces latitudes élevées.

En tout cas, ce ne serait point une navigation mais un traînage qui allait s’effectuer à la surface du lac Lindeman. Les religieuses pourraient néanmoins trouver place dans le bateau qui glisserait sur l’un de ses flancs, et les hommes le suivraient à pied.

On partit, mais ce ne fut pas sans avoir excité l’attelage de la voix et du fouet, car il ne semblait point disposé à se mettre en route. Du reste, le lac était animé par le va-et-vient de la foule, plusieurs centaines d’émigrants, escortant des véhicules de toutes sortes.

Comme la glace présentait un plan assez uniforme, Ben Raddle et Summy Skim avaient chaussé leurs mocassins, et si ce n’eût été l’obligation de ne pas distancer le bateau, ils auraient pu faire cette traversée du lac en une demi-heure. Mais mieux valait que la caravane ne s’éparpillât pas et demeurât sans cesse sous la direction du Scout.

Le temps était calme ; l’âpre brise de la journée précédente avait molli et tendait à retomber vers le sud. Cependant le froid était vif — une douzaine de degrés sous zéro —, circonstance favorable, en somme, très propice à la marche que rendent si pénibles les tourmentes de neige.

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