Page:Verne - Les Enfants du capitaine Grant.djvu/253

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capitaine Grant étaient du Callao, 30 mai 1862, d’après la Mercantile and Shipping Gazette. Comment, le 7 juin, huit jours après avoir quitté la côte du Pérou, le Britannia pouvait-il se trouver dans la mer des Indes ? Paganel, consulté à ce sujet, fit une réponse très-plausible, et dont de plus difficiles se fussent montrés satisfaits.

C’était un soir, le 12 décembre, six jours après le départ de l’île Amsterdam. Lord et lady Glenarvan, Robert et Mary Grant, le capitaine John, Mac Nabbs et Paganel, causaient sur la dunette. Suivant l’habitude, on parlait du Britannia, car c’était l’unique pensée du bord. Or, précisément, la difficulté susdite fut soulevée incidemment, et eut pour effet immédiat d’enrayer les esprits sur cette route de l’espérance.

Paganel, à cette remarque inattendue que fit Glenarvan, releva vivement la tête. Puis, sans répondre, il alla chercher le document. Lorsqu’il revint, il se contenta de hausser les épaules, comme un homme honteux d’avoir pu être arrêté un instant par une « semblable misère. »

« Bon, mon cher ami, dit Glenarvan, mais faites-nous au moins une réponse.

— Non, répondit Paganel, je ferai une question seulement, et je l’adresserai au capitaine John.

— Parlez, monsieur Paganel, dit John Mangles.

— Un navire bon marcheur peut-il traverser en un mois toute la partie de l’océan Pacifique comprise entre l’Amérique et l’Australie ?

— Oui, en faisant deux cents milles par vingt-quatre heures.

— Est-ce une marche extraordinaire ?

— Nullement. Les clippers à voiles obtiennent souvent des vitesses supérieures.

— Eh bien, reprit Paganel, au lieu de lire « 7 juin » sur le document, supposez que la mer ait rongé un chiffre de cette date, lisez « 17 juin » ou « 27 juin, » et tout s’explique.

— En effet, répondit lady Helena, du 31 mai au 27 juin...

— Le capitaine Grant a pu traverser le Pacifique et se trouver dans la mer des Indes ! »

Un vif sentiment de satisfaction accueillit cette conclusion de Paganel.

« Encore un point éclairci ! dit Glenarvan, et grâce à notre ami. Il ne nous reste donc plus qu’à atteindre l’Australie, et à rechercher les traces du Britannia sur sa côte occidentale.

— Ou sa côte orientale, dit John Mangles.

— En effet, vous avez raison, John. Rien n’indique dans le document que la catastrophe ait eu lieu plutôt sur les rivages de l’ouest que sur ceux de l’est. Nos recherches devront donc porter à ces deux