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LES FRÈRES KIP

— Trafiquer sans doute…, dit M. Hawkins.

— Il n’y a pas d’autre embarcation en vue ?… demanda Pieter Kip.

— Aucune », répliqua M. Gibson, qui venait d’examiner la mer du côté du large, puis au nord et au sud de l’ile d’Entrecasteaux.

La pirogue gagnait vers le brick, poussée par la double pagaie dont les palettes se levaient et s’abaissaient avec une régularité mécanique.

Lorsqu’elle ne fut plus qu’à une cinquantaine de pieds du James-Cook, un des indigènes se redressa et cria ce mot :

« Éboura… éboura ! »

Le capitaine, penché au-dessus du bastingage, se retourna vers ses compagnons et dit :

« C’est un mot qui signifie « oiseau » dans le langage des naturels de la Nouvelle-Irlande, et je suppose que les Papouas de la Nouvelle-Guinée lui donnent la même signification. »

M. Gibson ne se trompait pas. Le sauvage tenait de la main droite un oiseau qui valait sans doute la peine de figurer dans une collection ornithologique.

C’était, en effet, un paridisier de l’espèce manucode, comme on le vit bientôt, le paradisier royal, plumage rouge brun velouté, tête partiellement couleur orange, tache noirâtre à l’angle de l’œil, gorge mordorée, traversée d’une raie brunâtre et d’une raie d’un vert métallique, le reste du corps d’une parfaite blancheur, le flanc garni de plumes émeraude à leur extrémité, les unes rouges, les autres jaunes, avec filets cornés, armés de fines barbules, enroulés à leurs pointes. Cet oiseau, d’une longueur d’environ six pouces, est de ceux, prétend-on, qui ne perchent nulle part et dont les indigènes n’ont jamais pu découvrir le nid. C’est l’un des plus curieux, des plus intéressants en ce pays papoua, où ils se rencontrent en grand nombre.