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LES FRÈRES KIP

lisse, tandis que deux ou trois pirogues se dirigeaient vers l’arrière. Alors Karl Kip, secondé par Nat Gibson, s’élançant sur le capitan, lui troua la poitrine de deux balles, tandis que le jeune homme tirait sur les embarcations.

Lorsque les Papouas virent tomber leur chef, dont le corps disparut sous les eaux, ils ralentirent l’attaque et parurent disposés à l’abandonner. N’ayant pu surprendre le navire, ils se rendaient compte qu’elle ne réussirait pas, bien qu’ils fussent au moins quatre contre un. Ceux qui voulaient encore sauter sur le pont, soit par la proue, soit par le couronnement, ne tardèrent pas à lâcher pied. Obligés de se défendre à leur tour, ils tentèrent de se rembarquer dans les pirogues. Quelques-uns, grièvement frappés, se noyèrent. Et si deux ou trois matelots furent encore blessés à coups de parang, du moins n’y eut-il pas un mort de leur côté.

Il était à peine dix heures et quart lorsque les embarcations commencèrent à s’éloigner du brick.

Alors les derniers coups furent dirigés sur elles, tant qu’on put les apercevoir. À ce moment, sans doute par la faute d’un maladroit, — et la profonde obscurité eût été son excuse, — une balle vint frôler la tête de M. Gibson de si près que son chapeau fut emporté jusqu’à l’arrière du rouf.

Le capitaine ne s’en inquiéta pas autrement, bien que la balle eût failli lui traverser la tête. Il se précipita vers l’avant, suivi de son fils, qu’il venait d’appeler, et tous deux eurent rapidement mis en position la petite pièce de cuivre.

Les pirogues, à une encablure du James-Cook, présentaient encore une masse confuse vers laquelle le matelot Hobbes dirigea la lumière du fanal.

La pièce, chargée, étoupillée, était prête à faire feu par le sabord, qui fut relevé de ce côté.

Le coup partit, et des hurlements répondirent à la détonation.