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PORT-PRASLIN.

trois pics des Lanut. Lorsqu’un obstacle, rio ou marécage, obligeait à s’écarter du rivage, on s’engageait sous bois, le long de sentes à peine frayées. Là abondaient les areks, les pandanus, les baringtonias, les figuiers-banians. Un filet de lianes, quelques-unes d’un jaune éclatant comme de l’or, entouraient le tronc de ces arbres, s’entortillaient à leurs branches, grimpaient jusqu’à leur sommet. Il fallait prendre garde aux épines déchirantes, et M. Zieger de répéter à ses hôtes :

« Faites attention, je vous le recommande, sinon vous arriverez à la maison demi-nus, ce qui n’est pas convenable, même en Neu-Meeklenburg. »

Il y avait vraiment lieu d’admirer, et pour leur diversité et pour leur magnifique venue, les essences de ces forêts néo-irlandaises. À perte de vue se massaient les hibiscus, dont le feuillage rappelle celui du tilleul, des palmiers enguirlandés de festons volubiles, des callophyllums dont le tronc mesurait jusqu’à trente pieds de circonférence, des rotangs, des poivriers, des cycas à stipe droit, dont les indigènes recueillent la moelle pour fabriquer une sorte de pain, des lobélias à demi plongés dans l’eau, des pancratiums aux hampes agrémentées de corolles blanches, entre les feuilles desquels va se nicher le scarabe, qui n’est point un oiseau, mais un coquillage.

Tout ce domaine forestier affectait des proportions colossales, cocotiers, sagoutiers, arbres à pain, muscadiers, lataniers, areks, dont le bourgeon terminal se coupe comme le chou-palmiste, comestible autant que lui ; puis d’innombrables plantes arborescentes, fougères au léger feuillage, épidendrons parasites, inocarpes d’une taille supérieure à celle que leurs similaires acquièrent dans les autres îles du Pacifique et dont les racines, émergeant du sol, forment des cabanes naturelles où cinq ou six personnes peuvent trouver place.