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PREMIER VOYAGE DU CAPITAINE COOK.

impossibles à forcer pour les naturels, à moins que, par un long blocus, la garnison ne soit obligée à se rendre.

« Il est très surprenant, remarque Cook, que l’industrie et le soin qu’ils ont employés à bâtir, presque sans instruments, des places si propres à la défense, ne leur aient pas fait inventer, par la même raison, une seule arme de trait, à l’exception de la lance qu’ils jettent avec la main. Ils ne connaissent point l’arc pour les aider à décocher un dard, ni la fronde pour lancer une pierre, ce qui est d’autant plus étonnant que l’invention des frondes, des arcs et des flèches est beaucoup plus simple que celle des ouvrages que construisent ces peuples, et qu’on trouve d’ailleurs ces deux armes dans presque tous les pays du monde, chez les nations les plus sauvages. »

Le 6 février, Cook sortit de la baie et fit voile à l’est, dans l’espérance de trouver l’entrée du détroit facile avant le reflux de la marée. À sept heures du soir, le vaisseau fut entraîné, par la violence du courant, jusqu’auprès d’une petite île en dehors du cap Koamaroo. Des rochers très pointus s’élevaient du long de la mer. À chaque instant le danger augmentait. Un unique moyen restait de sauver le vaisseau. On le tenta, il réussit. La longueur d’un câble séparait seulement l’Endeavour de l’écueil, lorsqu’on laissa tomber l’ancre par soixante-quinze brasses d’eau. Par bonheur, l’ancre mordit, et le courant, qui changeait de direction après avoir frappé l’île, entraîna le navire au delà de l’écueil. Mais il n’était pas encore sauvé, car il était toujours très-près des rocs, et le courant faisait cinq milles à l’heure.

Cependant, lorsque le flux diminua, le bâtiment put se relever, et, le vent devenant favorable, il fut rapidement entraîné dans la partie la plus resserrée du détroit, qu’il franchit sans danger.

L’île la plus septentrionale de la Nouvelle-Zélande, qui porte le nom d’Eaheinomauwe, n’était cependant pas encore reconnue dans toutes ses parties ; il restait une quinzaine de lieues de côtes qu’on n’avait pas relevées. Certains officiers profitèrent de cette circonstance pour soutenir, malgré le sentiment de Cook, que ce n’était pas une île, mais bien un continent. Quoique son opinion fût faite, le commandant dirigea sa navigation de manière à éclaircir le doute qui pouvait subsister dans l’esprit de ses officiers. Après deux jours de route, pendant lesquels on dépassa le cap Palliser, il les appela sur le pont et leur demanda s’ils étaient convaincus. Sur leur réponse affirmative, Cook, renonçant à remonter jusqu’au point le plus méridional qu’il avait atteint sur la côte orientale d’Eaheinomauwe, résolut de prolonger dans toute sa longueur la terre dont il venait d’avoir connaissance, et qui portait le nom de Tawai-Pounamou.