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LES NAVIGATEURS FRANÇAIS.
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muscades trop avancées. Les clous de girofle, déjà aussi gros que des olives moyennes, conservaient encore un goût trop aromatique pour former une confiture agréable ; il faut avoir un palais indien pour se délecter de ces friandises ; j’en dirai autant du gingembre, dont nous avions aussi des confitures.

« La seule liqueur spiritueuse qu’on put se procurer fut de l’arack, dont on acheta plusieurs barriques. Quelques voyageurs vantent beaucoup trop cette liqueur, qui ne vaut pas même de médiocre eau-de-vie de vin. »

En sortant d’Amboine, l’expédition fit route pour la côte sud-ouest de l’Australie. Successivement furent reconnues, sans qu’on s’y arrêtât, l’île Kisser, la côte septentrionale de Timor, l’île Batou, Savu au coup d’œil enchanteur, et enfin, le 16 frimaire, l’extrémité occidentale de la côte sud-ouest de la Nouvelle-Hollande, qui avait été découverte, en 1622, par Leuwin.

Le rivage ne présentait qu’une suite de dunes aréneuses, au milieu desquelles s’élevaient des roches à pic, qui offraient le spectacle de la plus complète aridité.

La navigation, sur cette côte sans abri, fut fort dangereuse. La mer était forte, le vent violent, et il fallait naviguer au milieu des brisants. La frégate l’Espérance, pendant une forte bourrasque, allait être jetée à la côte, lorsqu’un officier nommé Legrand reconnut, du haut du grand mât, un mouillage où il affirmait que les bâtiments seraient en sûreté.

« Le salut des deux vaisseaux, dit la relation, tenait à cette découverte, car la Recherche, obligée de louvoyer pendant la nuit au milieu de ces écueils périlleux, après avoir lutté aussi longtemps qu’elle eût pu contre la force de la tempête, dans l’espoir qu’un changement de vent lui permît de gagner la pleine mer, se serait infailliblement perdue. Cette baie, qui porte le nom du citoyen Legrand, rappellera le service signalé que cet habile marin a rendu à notre expédition. »

Les îlots qui bordaient cette côte furent reconnus par les navigateurs. L’un d’eux, l’ingénieur-géographe de la Recherche, nommé Riche, qui était descendu sur la grande terre pour y faire quelques observations, s’égara et ne put regagner le bord que deux jours plus tard, exténué de fatigue et mourant de faim.

C’est au petit archipel dont nous venons de parler que se termine la découverte de Nuyts.

« Nous fûmes étonnés, dit La Billardière, de la précision avec laquelle la latitude en avait été déterminée par ce navigateur, à une époque où les instruments d’observation étaient encore très imparfaits. Je dois faire la même