Page:Verne - Les grands navigateurs du XVIIIe siècle, 1879.djvu/320

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
310
LES GRANDS NAVIGATEURS DU XVIIIe SIÈCLE.

Quant aux productions, ce sont les épices, le café, qui est inférieur à celui de la Réunion, et surtout le sagou, qui est cultivé dans tous les endroits marécageux.

« Le riz, qui se consomme à Amboine, n’est pas un produit de l’île ; il réussirait cependant très bien dans la plupart des terrains bas. Mais la Compagnie Hollandaise a défendu de cultiver cette denrée, parce que sa vente est un moyen de retirer des mains des naturels le numéraire qu’elle est obligée de leur donner pour le girofle qu’ils lui fournissent. Ils empêchent par là l’augmentation du numéraire et tiennent toujours à un prix très modique le produit du travail des habitants.

« C’est ainsi que le gouvernement, ne consultant que ses propres intérêts, étouffe parmi ces peuples toute industrie, en les forçant d’abandonner, pour ainsi dire, toute autre espèce de culture pour celle des girofliers et des muscadiers.

« Les Hollandais ont soin de limiter la culture des épiceries, afin qu’elle ne dépasse pas de beaucoup la consommation ordinaire. Ces moyens, destructeurs de toute activité, s’accommodent d’ailleurs assez avec la nonchalance de ces peuples. »

Ce fut le 23 vendémiaire de l’an I, pour nous conformer au nouveau style employé par La Billardière, que les deux frégates quittèrent Amboine, amplement pourvues de provisions, poules, canards et oies de Guinée, cochons, chèvres, patates, ignames, bananes et courges. Les viandes, toutefois, étaient en très petite quantité ; la farine était de mauvaise qualité ; quant au sagou qu’on embarqua pour la remplacer, l’équipage ne put jamais s’y habituer. Il ne nous reste plus à citer de la longue liste des provisions dont les navires furent chargés que les bambous, les clous de girofle confits et l’arack.

« De jeunes pousses de bambou coupées par tranches et confites au vinaigre, dit La Billardière, forment une excellente provision pour un voyage au long cours ; nous en emportâmes beaucoup. Ces jeunes pousses sont généralement fort tendres. On prend soin de les recueillir à temps ; elles se vendent au marché comme des légumes et peuvent en tenir lieu. Leur longueur est souvent d’un mètre, et leur épaisseur d’un tiers de centimètre.

« Ces jeunes pousses de bambou sont un légume très apprécié des Chinois, qui lui trouvent un goût rappelant singulièrement celui de l’asperge.

« Nous nous étions approvisionnés de clous de girofle et de muscades confites au sucre. Le brou de la muscade est, dans ce cas, la seule partie mangeable ; malheureusement, des confiseurs ignorants avaient choisi des