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LES GRANDS NAVIGATEURS DU XVIIIe SIÈCLE.

l’engageaient naturellement à abréger son séjour. Il reçut bientôt de Tchien-Lung la réponse aux lettres du roi d’Angleterre, les présents qu’on le chargeait de remettre au roi et ceux qui lui étaient destinés ainsi qu’à tous les officiers et fonctionnaires qui faisaient partie de sa suite. C’était un congé.

Macartney regagna Tong-chou-Fou par le canal Impérial. Pendant ce voyage de retour, les Anglais purent voir le fameux oiseau « leut-zé » pêcher pour le compte de son maître. C’est une sorte de cormoran. Il est si bien instruit, qu’on n’a besoin de lui mettre au cou ni cordon, ni anneau pour l’empêcher d’avaler une partie de sa proie.

« Sur chaque canot ou radeau, il y a dix ou douze de ces oiseaux, qui plongent à l’instant où leur maître leur fait un signe. On ne peut voir sans étonnement les énormes poissons que ces oiseaux prennent et rapportent dans leur bec. »

Macartney raconte une singulière manière de faire la chasse aux canards sauvages et aux oiseaux aquatiques. On laisse flotter sur l’eau des jarres vides et des calebasses pendant plusieurs jours, afin que les oiseaux aient le temps de s’habituer à cette vue. Puis, un homme entre dans l’eau, se coiffe d’un de ces vases, s’avance doucement, et, tirant par les pattes l’oiseau dont il a pu s’approcher, l’étouffe sous l’eau et continue sans bruit sa chasse jusqu’à ce que soit plein le sac qu’il a sur lui.

L’ambassadeur gagna Canton, puis Macao, et reprit le chemin de l’Angleterre. Nous n’avons pas à insister sur les péripéties de ce voyage de retour.

Il faut nous transporter maintenant dans cette autre partie de l’Asie, qu’on pourrait appeler l’Asie intérieure. Le premier voyageur sur lequel nous ayons à nous étendre quelque peu est Volney.

Il n’est personne qui ne connaisse, au moins de réputation, son livre des Ruines. Le récit de son voyage en Égypte et en Syrie lui est bien supérieur. Là, rien de déclamatoire ou de pompeux ; un style sobre, exact, positif en fait, un des meilleurs et des plus instructifs ouvrages qu’on puisse lire. Les membres de l’expédition d’Égypte y trouvèrent, dit-on, des indications précieuses, une appréciation exacte du climat, des produits du sol, des mœurs des habitants.

Au reste, Volney s’était préparé par un entraînement sérieux à ce voyage. C’était pour lui une grande entreprise, et il ne voulait laisser au hasard que le moins de prise possible. C’est ainsi qu’à peine arrivé en Syrie, il avait compris qu’il ne pouvait pénétrer intimement dans les dessous de l’existence du peuple qu’en se mettant à même, en apprenant la langue, de recueillir personnelle-