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LES GRANDS NAVIGATEURS DU XVIIIe SIÈCLE.

Ce n’est que dans le dernier quart du xviiie siècle que fut connue cette immense chaîne de lacs, de rivières et de portages qui, partant du lac Supérieur, ramasse toutes les eaux qui tombent des montagnes Rocheuses et les déverse dans l’océan Glacial. C’est à des négociants en fourrures, les frères Frobisher, et à M. Pond, qui arriva jusqu’à Athabasca, qu’est due en partie leur découverte.

Grâce à ces reconnaissances, le chemin devient moins difficile, les explorateurs se succèdent, les établissements se rapprochent, le pays est découvert. Bientôt même on entend parler d’une grande rivière qui se dirige vers le nord-ouest.

Ce fut Alexandre Mackenzie qui lui donna son nom. Parti, le 3 juin 1789, du fort Chippewayan, sur la plage méridionale du lac des Collines, il emmenait avec lui quelques Canadiens et plusieurs Indiens, dont l’un avait accompagné Samuel Hearne. Parvenu en un point situé par 67° 45’ de latitude, Mackenzie apprit qu’il n’était pas éloigné de la mer à l’est, mais qu’il en était encore plus près à l’ouest. Il approchait évidemment de l’extrémité nord-ouest de l’Amérique.

Le 12 juillet, Mackenzie atteignit une grande nappe d’eau qu’à son peu de profondeur et aux glaces qui la recouvraient, on ne pouvait prendre pour la mer, bien qu’on n’aperçut aucune terre à l’horizon. Et cependant, c’était bien l’Océan boréal que Mackenzie venait d’atteindre. Il en demeura convaincu, lorsqu’il vit les eaux monter, bien que le vent ne fût pas violent. C’était la marée. Le voyageur gagna ensuite une île qu’il apercevait à quelque distance de la côte. Il vit de là plusieurs cétacés qui se jouaient au milieu des flots. Aussi cette île, qui gît par 69° 14’ de latitude, reçut-elle du voyageur le nom d’île des Baleines. Le 12 septembre, l’expédition rentrait heureusement au fort Chippewayan.

Trois ans plus tard, Mackenzie, en qui la soif des découvertes n’était pas éteinte, remontait la rivière de la Paix, qui prend sa source dans les montagnes Rocheuses. En 1793, après être parvenu à se frayer une route à travers cette chaîne difficile, il reconnaissait de l’autre côté des montagnes une rivière, le Tacoutche-tesse, qui coulait vers le sud-ouest. Au milieu de dangers et de privations qu’il est plus facile d’imaginer que de rendre, Mackenzie descendit ce cours d’eau jusqu’à son embouchure, c’est-à-dire au-dessous des îles du Prince-de-Galles. Là, sur la paroi d’un rocher, il traça, avec un mélange de graisse et de vermillon, cette inscription, aussi éloquente que laconique : « Alexandre Mackenzie. venu du Canada par terre, ce 22 juillet 1793. » Le 24 août, il rentrait au fort Chippewayan.

Dans l’Amérique méridionale, aucun voyage scientifique n’a lieu pendant la première moitié du xviiie siècle. Il ne reste guère à parler que de La