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Page:Verne - Mathias Sandorf, Hetzel, 1885, tome 1.djvu/246

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mathias sandorf.

kreutzer dans la caisse, — si l’on peut donner ce nom prétentieux au coin de foulard, dans lequel Pointe Pescade enfermait habituellement la fortune des deux associés. En vain s’escrimait-il sur ses tréteaux ! En vain lançait-il des appels désespérés à travers l’espace ! En vain Cap Matifou exhibait-il des biceps, dont les veines saillaient comme les ramifications d’un lierre autour d’un tronc noueux ! Aucun spectateur ne manifestait la pensée d’entrer dans l’enceinte de toile.

« Durs à la détente, ces Dalmates ! disait Pointe Pescade.

— Des pavés ! répétait Cap Matifou.

— Décidément, je crois que nous aurons quelque peine à étrenner aujourd’hui ! Vois-tu, Cap Matifou, il faudra plier bagage !

— Pour aller où ? demanda le géant.

— Tu es bien curieux ! répondit Pointe Pescade.

— Dis toujours.

— Eh bien, que penserais-tu d’un pays, où on serait à peu près sûr de manger une fois par jour ?

— Quel est ce pays-là, Pointe Pescade ?

— Ah ! c’est loin, bien loin, très loin… et même plus loin que très loin, Cap Matifou !

— Au bout de la terre ?

— La terre n’a pas de bout, répondit sentencieu-