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mathias sandorf.

tage. Où avait-il vécu et dans quelles conditions, nul n’aurait pu le dire. On affirmait seulement que ce docteur Antékirtt était pour ainsi dire adoré des populations dans ces contrées de l’Asie Mineure et de l’Afrique Orientale, qu’il passait pour un médecin hors ligne, que le bruit de ses cures extraordinaires était arrivé jusque dans les grands centres scientifiques de l’Europe, que ses soins, il ne les épargnait pas plus aux pauvres gens qu’aux riches seigneurs et pachas de ces provinces. Mais on ne l’avait jamais vu dans les pays d’Occident, et même, depuis quelques années, on ne connaissait pas le lieu de sa résidence. De là, cette propension à le faire sortir de quelque mystérieux avatar, de quelque incarnation hindoue, à en faire un être surnaturel, guérissant par des moyens surnaturels.

Mais, si le docteur Antékirtt n’avait pas encore exercé son art dans les principaux États de l’Europe, sa renommée l’y avait déjà précédé. Bien qu’il ne fût arrivé à Raguse qu’en simple voyageur, — un riche touriste qui se promenait sur son yacht et visitait les divers points de la Méditerranée, — son nom courut bientôt à travers la ville. Et, en attendant qu’on pût voir le docteur lui-même, la goélette qui le portait eut le privilège d’attirer les regards. L’accident, prévenu par le courage de Cap Matifou,