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méditerranée.

l’art médical. Le docteur n’y devait point faillir.

« Il vivra !… Je veux qu’il vive ! se répétait-il. Ah ! pourquoi, à Cattaro, n’ai-je pas mis mon premier projet à exécution ?… Pourquoi l’arrivée de Sarcany, à Raguse, m’a-t-elle empêché de l’arracher à cette ville maudite !… Mais je le sauverai !… À l’avenir, Pierre Bathory doit être le bras droit de Mathias Sandorf ! »

En effet, depuis quinze ans, punir et récompenser, telle avait été la pensée constante du docteur Antékirtt. Ce qu’il devait à ses compagnons, Étienne Bathory et Ladislas Zathmar, encore plus qu’à lui-même, il ne l’avait pas oublié. Maintenant l’heure était venue d’agir, et c’est pourquoi la Savarèna l’avait transporté à Raguse.

Le docteur, pendant cette longue période, avait changé au physique, et, de telle façon qu’il eût été impossible de le reconnaître. Ses cheveux, qu’il portait en brosse, étaient devenus blancs, et son teint avait pris une pâleur mate. C’était un de ces hommes de cinquante ans, qui ont gardé la force de la jeunesse, tout en gagnant la froideur et le calme de l’âge mûr. La chevelure touffue, le teint coloré, la barbe d’un rouge vénitien du jeune comte Sandorf, rien de cela ne pouvait revenir à l’esprit de ceux qui se trouvaient en présence du