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les bouches de cattaro.

considéré, demeurât à Raguse, à quelques pas, dans le Stradone. Le docteur ne les lui avait pas nommés. Pourquoi ? Sans doute, parce que l’heure n’était pas venue de les démasquer. Mais il les connaissait. Il savait que Silas Toronthal était l’un de ces traîtres et Sarcany, l’autre. Et, s’il n’avait pas été plus loin dans ses confidences, c’est qu’il comptait sur le concours de Pierre Bathory, c’est qu’il voulait associer le fils à l’œuvre de justice qui devait atteindre les meurtriers de son père, et venger avec lui ses deux compagnons, Ladislas Zathmar et le comte Mathias Sandorf !

Et voilà ce qu’il ne pouvait plus dire au fils d’Étienne Bathory, sans le frapper au cœur !

« Peu importe ! répéta-t-il. Ce cœur, je le briserai. »

Ce parti bien arrêté, comment agirait le docteur Antékirtt ? Révéler à Mme Bathory ou à son fils le passé du banquier de Trieste ? Mais possédait-il les preuves matérielles de sa trahison ? Non, puisque Mathias Sandorf, Étienne Bathory et Ladislas Zathmar, les seuls qui eussent jamais eu ces preuves, étaient morts. Répandre dans la ville le bruit de cet acte abominable, sans en prévenir la famille Bathory ? Oui, cela eût suffi, sans doute, à creuser un nouvel abîme entre Pierre et la jeune