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Page:Verne - Mirifiques aventures de Maître Antifer, 1894.djvu/311

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— Oui.

— Consentez-vous donc à lui dire qu’il se tienne prêt à s’embarquer avec nous ?…

— Non ! » répondit maître Antifer.

Et ce « non » fut lancé d’une voix si formidable qu’il arriva comme une balle en pleine poitrine du notaire.

« Voyons, reprit Gildas Trégomain, tu ne veux pas entendre raison, et tu as tort. Pourquoi s’obstiner contre vent et marée ?… Rien de plus sensé que d’écouter Juhel, rien de plus raisonnable que de suivre son conseil ! Certes, ce Ben-Omar ne me revient pas plus qu’à toi !… Mais puisqu’il faut en tâter, faisons contre fortune bon cœur », etc.

Il était rare que Gildas Trégomain se permit un si long monologue, et encore plus rare que son ami le lui laissât achever. Aussi avec quelles crispations de mains, quel roulement de mâchoires, quelles grimaces convulsives, il accueillit le gabarier pendant que celui-ci dévidait son chapelet ! Peut-être même, très satisfait de son éloquence, l’excellent homme s’imagina-t-il avoir convaincu cet irréductible Breton, lorsque sa dernière période eût pris fin.