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mistress branican.

les noix, tombées il y avait longtemps, n’étaient plus que poussière et pourriture.

Jusqu’alors, aucun autre objet n’avait été recueilli ; mais, à quelques pas du bouquet d’arbres, sur la pente d’un léger vallonnement, il fut facile de reconnaître quelques traces de culture au milieu du fouillis clairsemé de broussailles. Ce qui en restait, c’étaient des ignames et des patates paraissant revenues à l’état sauvage. Une pioche gisait sous d’épaisses ronces, où l’un des matelots la découvrit par hasard. Il semblait bien qu’elle dût avoir été fabriquée en Amérique, d’après l’emmanchement de son fer, qui était profondément rongé par la rouille.

« Qu’en pensez-vous, capitaine Ellis ? demanda le maître d’équipage.

— Je pense qu’il n’y a pas lieu, pour l’instant, de nous prononcer à ce sujet, répondit le capitaine Ellis.

— Alors poussons plus avant », répliqua Zach Fren, en faisant signe aux hommes de le suivre.

Ayant descendu les pentes du plateau, ils arrivèrent sur la bordure à laquelle se rattachait le promontoire du nord. En cet endroit, se creusait une étroite sinuosité, entaillant la crête, qui permettait de descendre sans trop de peine au niveau d’une petite grève sablonneuse. Cette grève, mesurant un acre environ, était encadrée de roches d’un beau ton roux que les coups du ressac balayaient sans relâche.

Sur ce sable étaient épars de nombreux objets, indiquant que des êtres humains avaient fait un séjour prolongé en ce point de l’île, — morceaux de verre ou de faïence, débris de grès, chevilles de fer, boîtes de conserves dont la provenance américaine n’était pas douteuse cette fois ; puis, d’autres ustensiles à l’usage de la marine, quelques fragments de chaînes, des anneaux rompus, des bouts de gréement en fer galvanisé, une patte de grappin, plusieurs réas de poulie, un organeau faussé, une bringuebale de pompe, des débris d’espars et de dromes, des plaques de tôle arrachées d’une pièce à eau, sur l’origine desquels des marins de la Californie ne pouvaient guère se tromper.