Ledit Sib s’assura que la guinée était toujours au fond de sa poche, bien décidé à ne point se la laisser reprendre.
Le moment était venu. Élisa saisit Sib par la main, descendit sur la scène.
Sib fut d’abord ébloui par les traînées d’en bas, les herses d’en haut, les portants flamboyants de gaz. Il se sentait éperdu au milieu du va-et-vient des figurants et des artistes, qui le regardaient en riant.
C’est qu’il était véritablement honteux avec ses vilains habits de petit pauvre !
Enfin les trois coups retentirent.
Sib tressaillit comme s’il les eût reçus dans le dos.
Le rideau se leva.
La duchesse de Kendalle était seule en scène, monologuant au milieu d’un décor de chaumière. Tout à l’heure, la porte du fond s’ouvrirait, un enfant entrerait, s’avancerait vers elle en lui tendant la main, et cet enfant serait le sien.
Il faut noter qu’aux répétitions, P’tit-Bonhomme avait été très chagriné, lorsqu’il s’était vu réduit à l’obligation de demander l’aumône. On se rappelle sa fierté native, sa répugnance quand on voulait le contraindre à mendier au profit de la ragged-school. Miss Anna Waston lui avait bien dit que ce n’était point « pour de bon ». N’importe, cela ne lui allait pas du tout… Dans sa naïveté, il prenait les choses au sérieux et finissait pas croire qu’il était véritablement l’infortuné petit Sib.
En attendant son entrée, et tandis que le régisseur lui tenait la main, il regardait à travers l’entrebâillement de la porte. Avec quel ébahissement ses yeux parcouraient cette vaste salle pleine de monde, inondée de lumière, les girandoles des avant-scènes, l’énorme lustre, comme un ballon de feu suspendu en l’air. C’était si différent de ce qu’il avait vu, lorsqu’il assistait aux représentations sur le devant d’une loge.
À ce moment le régisseur lui dit :
« Attention, Sib !