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seconde patrie.


– Eh bien, avant quinze jours, avant huit peut-être, la Licorne sera mouillée dans la baie du Salut, fit observer M. Zermatt, et nous n’aurons plus rien à craindre… Mais achève ton récit. »

Jack continua en ces termes :

« Ce fut dans la matinée seulement, après une longue étape, sans avoir pris un instant de repos, que nous arrivâmes aux falaises qui dominent la côte.

« Au pied était établi un campement occupé par une centaine de ces coquins d’un noir d’ébène… rien que des hommes à demi nus, blottis dans les grottes creusées au bas de la falaise… C’étaient des pêcheurs, – je l’imaginai, du moins, – qui avaient dû être entraînés vers notre île par les vents d’est, et dont les pirogues étaient tirées sur le sable… Tous accoururent au-devant de moi… Ils me considéraient avec autant de surprise que de curiosité, comme si c’était la première fois qu’ils voyaient un homme blanc… D’ailleurs, il n’y a pas à s’en étonner, puisque les navires d’Europe ne traversent guère cette partie de l’océan Indien.

« Au surplus, après m’avoir examiné de très près, ils reprirent l’indifférence qui leur est naturelle… Je ne fus pas maltraité… On me donna quelques poissons grillés que je mangeai avidement, car je mourais de faim, et je calmai ma soif avec l’eau d’un rio qui descendait de la falaise.