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le numéro 9672.

que le pôle leur envoie à travers les plaines du Nord-Amérique ? Métier pénible et périlleux, ce métier de pêcheur, qui était celui de Ole ! Et s’il le faisait, n’était-ce point pour lui en rapporter les bénéfices, à elle, sa fiancée, qu’il devait épouser au retour ! Pauvre Ole ! Que disait-il dans cette lettre ? Sans doute, qu’il aimait toujours Hulda, comme Hulda l’aimerait toujours, que leurs pensées se confondaient, malgré la distance, et qu’il voudrait être au jour de son arrivée à Dal !

Oui ! il devait dire tout cela, Hulda en était sûre. Mais, peut-être ajoutait-il que son retour était proche, que cette campagne de pêche, qui entraîne les marins de Bergen si loin de leur terre natale, allait prendre fin ! Peut-être Ole lui apprenait-il que le Viken achevait d’arrimer sa cargaison, qu’il se préparait à appareiller, que les derniers jours d’avril ne s’écouleraient pas sans que tous deux fussent réunis en cette heureuse maison du Vestfjorddal ? Peut-être l’assurait-il, enfin, que l’on pouvait déjà fixer le jour où le pasteur viendrait de Mœl pour les unir dans la modeste chapelle de bois dont le clocher émergeait d’un épais massif d’arbres, à quelques centaines de pas de l’auberge de dame Hansen ?

Pour le savoir, il suffisait simplement de briser le cachet de l’enveloppe, d’en tirer la lettre de Ole, de la lire, même à travers les larmes de douleur ou de joie que son contenu pourrait amener dans les yeux de Hulda. Et, sans doute, plus d’une impatiente fille du Midi, une fille de la Dalécarlie, du Danemark ou de la Hollande, eût déjà su ce que la jeune Norvégienne ne savait pas encore ! Mais Hulda rêvait, et les rêves ne se terminent que lorsqu’il plaît à Dieu de les finir. Et que de fois on les regrette, tant la réalité est décevante !

« Ma fille, dit alors dame Hansen, cette lettre que ton frère t’a envoyée, c’est bien une lettre de Ole ?

– Oui ! j’ai reconnu son écriture !

– Eh bien, veux-tu donc remettre à demain pour la lire ? »

Hulda regarda une dernière fois l’enveloppe. Puis, après l’avoir décachetée sans trop de hâte, elle en retira une lettre soigneusement calligraphiée et lut ce qui suit :