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TERRE ! TERRE !

Cependant, Dick Sand commanda si bien et fut si bien obéi, qu’après une heure de travail, la voile était enverguée, la vergue hissée et le hunier convenablement établi avec deux ris.

Quant à la misaine et au second foc, qui avaient pu être serrés avant la tempête, ces voiles furent installées sans trop de peine, malgré la force du vent.

Enfin, ce jour-là, à dix heures du matin, le Pilgrim faisait route sous sa misaine, son hunier et son foc.

Dick Sand n’avait pas jugé prudent de faire plus de toile. La voilure qu’il portait devait lui assurer, tant que le vent ne mollirait pas, une vitesse de deux cents milles au moins par vingt-quatre heures, et il ne lui en fallait pas davantage pour atteindre la côte américaine avant dix jours.

Le novice fut vraiment satisfait, quand, revenu à la barre, il reprit son poste, après avoir remercié maître Jack, l’aide-timonier du Pilgrim. Il n’était plus à la merci des lames. Il faisait bonne route. Sa joie sera comprise de tous ceux qui sont familiarisés quelque peu avec les choses de la mer.

Le lendemain, les nuages couraient encore avec la même vitesse, mais ils laissaient entre eux de grandes trouées, par lesquelles les rayons du soleil se projetaient jusqu’à la surface des eaux. Le Pilgrim en était parfois inondé. Bonne chose que cette vivifiante lumière ! Quelquefois, elle s’éteignait derrière une large masse de vapeurs qui filait dans l’est, puis elle reparaissait pour disparaître encore, mais le temps redevenait beau.

Les panneaux avaient été ouverts afin de ventiler l’intérieur du navire. Un air salubre pénétrait dans la cale, dans le carré de l’arrière, dans le poste de l’équipage. On mit sécher les voiles humides, qui furent étendues sur les dromes. Le pont fut aussi nettoyé. Dick Sand ne voulait pas que son navire arrivât au port sans avoir fait un bout de toilette. Sans surmener l’équipage, quelques heures, employées chaque jour à cette besogne, devaient la conduire à bonne fin.

Bien que le novice ne pût plus jeter le loch, il avait assez l’habitude d’estimer le sillage d’un navire pour se rendre à peu près compte de sa vitesse. Il ne doutait donc pas d’avoir connaissance de la terre avant sept jours, et, cette opinion, il la fit partager à Mrs Weldon, après lui avoir montré sur la carte la position probable du navire.

« Eh bien ! à quel point de la côte arriverons-nous, mon cher Dick ? lui demanda-t-elle.

— Ici, mistress Weldon, répondit le novice, en indiquant ce long cordon littoral qui s’étend du Pérou au Chili. Je ne saurais être plus précis. Voici l’île de Pâques, que nous avons laissée dans l’ouest, et, par la direction du vent, qui