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Page:Verne - Un capitaine de quinze ans, Hetzel, 1878.djvu/246

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UN CAPITAINE DE QUINZE ANS

contre des indigènes, peut-être lancés à leur poursuite déjà sous la direction d’Harris et de Negoro.

Mais le jour ne se faisait pas encore. Aucune lueur ne s’infiltrait par l’orifice inférieur au dedans du cône. Des roulements, que l’épaisseur des parois rendaient sourds, indiquaient que l’orage ne s’apaisait pas. En prêtant l’oreille, Dick Sand entendait aussi la pluie tomber avec violence à la base de la fourmilière, et comme les larges gouttes ne frappaient plus un sol dur, il fallait en conclure que toute la plaine était inondée.

Il devait être onze heures environ. Dick Sand sentit alors qu’une sorte de torpeur, sinon un véritable sommeil, allait l’endormir. Ce serait toujours du repos. Mais au moment d’y céder, la pensée lui vint que par le tassement de l’argile imbibée, l’orifice inférieur risquait de s’obstruer. Tout passage eût été fermé à l’air du dehors, et au dedans, la respiration de dix personnes allait promptement le vicier en le chargeant d’acide carbonique.

Dick Sand se laissa donc glisser jusqu’au sol, qui avait été rehaussé avec l’argile du premier étage d’alvéoles.

Ce bourrelet était parfaitement sec encore, et l’orifice entièrement dégagé. L’air pénétrait librement à l’intérieur du cône, et avec lui quelques lueurs de fulgurations et les sonorités éclatantes de cet orage qu’une pluie diluvienne ne pouvait éteindre.

Dick Sand vit que tout était bien. Aucun danger ne semblait menacer immédiatement ces termites humains substitués à la colonie des névroptères. Le jeune novice songea donc à se refaire par quelques heures de sommeil, puisqu’il en subissait déjà l’influence.

Seulement, par une suprême précaution, Dick Sand se coucha sur ce terrassement d’argile, au bas du cône, à portée de l’étroit orifice. De cette façon, aucun accident ne pourrait se produire à l’extérieur, sans qu’il fût le premier à le signaler. Le jour levant le réveillerait aussi, et il serait à même de commencer l’exploration de la plaine.

Dick Sand se coucha donc, la tête accotée à la paroi, son fusil sous sa main, et, presque aussitôt, il s’endormit.

Ce qu’avait duré cet assoupissement, il n’aurait pu le dire, lorsqu’il fut réveillé par une vive sensation de fraîcheur.

Il se releva et reconnut, non sans grande anxiété, que l’eau envahissait la fourmilière, et si rapidement même qu’elle eut atteint en quelques secondes l’étage d’alvéoles qu’occupaient Tom et Hercule.