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UN CAPITAINE DE QUINZE ANS

Oui ! c’était bien Hercule qui avait joué sa vie pour sauver celle de Dick Sand. Mais, il était ainsi fait, et sa modestie ne lui permettait pas d’en convenir. D’ailleurs, il trouvait la chose toute simple, et il répéta que pas un de ses compagnons n’eût hésité à agir comme il avait agi en cette circonstance.

Cela amena Mrs Weldon à parler du vieux Tom, de son fils, d’Actéon, de Bat, ses infortunés compagnons !

Ils étaient partis pour la région des lacs. Hercule les avait vus passer avec la caravane d’esclaves. Il les avait suivis, mais aucune occasion ne s’était offerte de pouvoir communiquer avec eux. Ils étaient partis ! Ils étaient perdus !

Et au bon rire d’Hercule avaient succédé de grosses larmes qu’il ne cherchait point à retenir.

« Ne pleurez pas, mon ami, lui dit Mrs Weldon. Qui sait si Dieu ne nous fera pas la grâce de les revoir un jour ! »

Quelques mots instruisirent alors Dick Sand de tout ce qui s’était passé pendant le séjour de Mrs Weldon à la factorerie d’Alvez.

« Peut-être, ajouta-t-elle, eût-il mieux valu demeurer à Kazonndé…

— Maladroit que je suis ! s’écria Hercule.

— Non, Hercule, non ! répondit Dick Sand. Ces misérables auraient trouvé moyen d’attirer monsieur Weldon dans quelque piège ! Fuyons tous ensemble et sans retard ! Nous serons arrivés à la côte avant que Negoro soit de retour à Mossamédès ! Là, les autorités portugaises nous donneront aide et protection, et quand Alvez se présentera pour toucher les cent mille dollars…

— Cent mille coups de bâton sur le crâne de ce vieux coquin ! s’écria Hercule, et je me charge de lui régler son compte ! »

Cependant, c’était là une complication, bien que Mrs Weldon, évidemment, ne pût songer à retourner à Kazonndé. Il s’agissait donc de devancer Negoro. Tous les projets ultérieurs de Dick Sand devaient tendre à ce but.

Dick Sand avait enfin mis à exécution ce plan qu’il avait depuis longtemps imaginé, de gagner le littoral en utilisant le courant d’une rivière ou d’un fleuve. Or, le cours d’eau était là, sa direction le portait au nord, et il était possible qu’il se jetât dans le Zaïre. En ce cas, au lieu d’atteindre Saint-Paul de Loanda, ce serait aux bouches de ce grand fleuve qu’arriveraient Mrs Weldon et les siens. Peu importait, d’ailleurs, puisque les secours ne leur manqueraient pas dans ces colonies de la Guinée inférieure.

La première pensée de Dick Sand, décidé à descendre le courant de cette rivière, avait été de s’embarquer sur l’un de ces radeaux herbeux, sortes d’îlots