Si le garçon de banque n’eût pas été chargé d’une aussi forte somme, il aurait trouvé sans doute le conseil excellent… Mais avec ses quinze mille roubles…
Et, d’ailleurs, dans le voisinage, y avait-il, en cette région déserte, une ferme, une auberge, un cabaret où des voyageurs pussent se réfugier jusqu’au matin ?… Ce fut la question que Poch posa tout d’abord.
« Oui… là… sans doute ! » répondit le voyageur.
Et, de la main, il indiquait une faible lumière qui brûlait à deux cents pas sur la gauche, au coin d’un bois confusément entrevu dans l’ombre. Mais était-ce le fanal d’une auberge ou le feu d’un bûcheron ?…
L’iemschick, interrogé, répondit :
« C’est le cabaret de Kroff.
— Le cabaret de Kroff ?… répéta Poch.
— Oui… le kabak de la Croix-Rompue.
— Eh bien, dit Broks, en s’adressant à ses compagnons, si vous voulez coucher dans cette auberge, nous viendrons vous reprendre demain dès la première heure. »
La proposition parut agréer au voyageur. C’était, en somme, ce qu’il y avait de mieux à faire. Le temps devenait épouvantable, la pluie ne tarderait pas à tomber torrentiellement. Ce ne serait pas sans grande peine que le conducteur et l’iemschick parviendraient à gagner Pernau avec leur attelage.
« Convenu, dit alors Poch, que sa jambe écorchée faisait quelque peu souffrir. Demain, après une bonne nuit de repos, je serai en état de repartir, et je compte sur toi, Broks…
— Je serai de retour à l’heure dite ! » répliqua le conducteur. Les chevaux furent alors dételés, et la malle, couchée sur le flanc, dut être abandonnée. Mais, cette nuit-là, il était probable que ni voiture ni charrette ne viendraient à passer sur la route.
Après avoir serré la main de son ami, Poch, traînant la jambe,