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LE DÉSERT DE GLACE

de Duk, sans s’en effrayer d’ailleurs ; ils broutaient une sorte de mousse rose qui veloutait le sol dépourvu de neige. Le docteur les reconnut facilement à leur taille moyenne, à leurs cornes très-élargies et soudées à la base, à cette curieuse absence de mufle, à leur chanfrein busqué comme celui du mouton et à leur queue très-courte : l’ensemble de cette structure leur a fait donner, par les naturalistes, le nom d’« ovibos », mot composé qui rappelle les deux natures d’animaux dont ils tiennent. Une bourre de poils épaisse et longue, et une sorte de soie brune et fine formaient leur pelage.

À la vue des chasseurs, les deux animaux ne tardèrent pas à prendre la fuite, et ceux-ci les poursuivirent à toutes jambes.

Mais les atteindre était difficile à des gens qu’une course soutenue d’une demi-heure essouffla complètement. Hatteras et ses compagnons s’arrêtèrent.

« Diable ! fit Altamont.

— Diable est le mot, répondit le docteur, dès qu’il put reprendre haleine. Je vous donne ces ruminants-là pour des Américains, et ils ne paraissent pas avoir de vos compatriotes une idée très-avantageuse.

— Cela prouve que nous sommes de bons chasseurs, » répondit Altamont.

Cependant les bœufs musqués, ne se voyant plus poursuivis, s’arrêtèrent dans une posture d’étonnement. Il devenait évident qu’on ne les forcerait pas à la course ; il fallait donc chercher à les cerner ; le plateau qu’ils occupaient alors se prêtait à cette manœuvre. Les chasseurs, laissant Duk harceler ces animaux, descendirent par les ravines avoisinantes, de manière à tourner le plateau. Altamont et le docteur se cachèrent à l’une de ses extrémités derrière des saillies de roc,