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et je l’ai reproduite en 1891 dans mon livre intitulé Cinq années de séjour aux Îles Canaries.

Mais ce n’est pas pour revendiquer des droits de priorité que j’ai demandé la parole. J’ai voulu simplement vous rappeler les faits qui doivent faire rejeter d’une façon absolue l’existence d’une Atlantide dont aurait fait partie l’archipel Canarien. Certes aucun de vous n’a pu songer à mettre en doute les affirmations de M. Gabriel de Mortillet. J’ai pensé, néanmoins, qu’il ne serait pas mauvais qu’on trouvât dans nos Bulletins l’énumération des principaux arguments qui viennent à l’appui de ces assertions.

Les Canaries sont sans contredit des îles essentiellement volcaniques, qui ont émergé à une époque récente. Bory de Saint-Vincent avait, il est vrai, signalé dans l’archipel l’existence de roches anciennes, notamment de « granites parfaitement conservés » ; mais, mieux étudiés, ces granites sont devenus des roches volcaniques « à éléments très grossiers qui simulent, par leur aspect, des roches plutoniques »[1]. Léopold de Buch, Lyell et Berthelot se sont également trompés quand ils ont signalé la présence, à la Grande Canarie, de micacites, d’eurites et de diabases. Ces prétendus éléments anciens examinés au microscope et étudiés chimiquement, notamment par MM. Fouqué et S. Calderon, se sont convertis en roches éruptives.

Il en est de même des « lits de sables ferrugineux qui n’ont éprouvé aucune altération » que Bory de Saint-Vincent avait rencontrés. Leur fréquence est remarquable, car on les trouve à chaque pas ; mais ils sont modernes. Beaucoup de cônes volcaniques tout à fait récents ont leurs flancs recouverts de ce sable, qui, sur un grand nombre de points, forme la couche la plus superficielle. Je connais plusieurs « lits de sable ferrugineux » qui proviennent d’éruptions ne remontant qu’à la fin du siècle dernier.

Les argiles de la Laguna, dans l’île de Ténériffe, ne dénotent pas non plus une haute antiquité de l’archipel. Elles résultent de la décomposition des cendres, des scories, etc., que les eaux pluviales ont entraînées des sommets voisins dans le fond de la cuvette limitée par les montagnes.

C’est encore par suite d’études incomplètes que L. de Buch et

  1. S. Calderon y Arassa, La Evolucion en las rocas volcànicas en general y en las Islas Canarias en particular (Anales de la Soc. esp. de Hist. natural, t. VIII, Madrid, 1879).