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LA NOUVELLE ÉQUIPE

Les deux frères Bournef, Maurice et Léon, étaient fils d’un instituteur de Seine-et-Oise, lui même fils d’un cultivateur de la région de Mantes. Tous les Bournef étaient de lignée paysanne. Quelques-unes des branches maternelles prenaient leur source dans le petit artisanat de province ; mais, comme le disait plaisamment Maurice, il n’y avait ni blason ni galon dans la famille.

Comment Maurice avait-il épousé la fille d’un général ? C’était là une des conséquences du flux social de notre époque, qui connaît au moins autant le mélange que la lutte des classes. Jeanne Delmas et Maurice Bournef s’étaient rencontrés, au temps où le jeune homme était encore normalien, dans la famille d’un condisciple de Maurice, Bernard Lautier, très lié avec lui. Les deux jeunes gens, que des affinités de nature avaient rapprochés, s’étaient aimés, et Jeanne avait promis d’attendre la fin des études de Maurice avant de parler de son choix à ses parents. Nous l’avons dit, le général avait d’abord mal accueilli l’idée de cette union ; mais il avait cédé devant la persévérance de sa fille.

Le frère de Maurice, Léon, comme lui normalien, était comme lui professeur d’histoire. Les deux frères étaient unis par une très tendre amitié. L’harmonie de leurs caractères, la parité de leurs goûts et de leurs idées, en avaient fait deux collaborateurs dont les noms étaient inséparables. Tous deux, d’esprit profondément républicain, idéaliste, humanitaire, s’étaient attachés à l’étude des questions sociales et internationales. Bien qu’ils fussent jeunes, leur réputation était déjà solide dans la fraction avancée de l’élite intellectuelle, et, à l’heure où commence notre récit, ils travaillaient à une « Histoire du Monde du Travail » qu’on attendait avec une sympathique curiosité.

Léon, de deux ans plus jeune que son frère, était