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LA NOUVELLE ÉQUIPE

— Elle le sera, allez, dit-elle. Vous pensez bien que si les chefs font la mobilisation, c’est qu’ils sont bien décidés. C’est 70 qui va recommencer.

— C’est vrai, vous avez vu la guerre de 70, vous Madame ?

— Oui. J’avais seize ans. J’étais à Paris pendant le siège et j’ai eu faim. Si les enfants veulent m’écouter voyez-vous, Madame, on s’arrangerait pour quitter Paris aussitôt après le départ de Jacques. J’ai un cousin dans la Creuse.

— Mais, maman, si on a la guerre il n’est pas dit qu’il y aura encore le siège autour de Paris.

— On ne perd rien à être prévoyant, fit la vieille en secouant la tête. En 70, tout le monde disait qu’on serait victorieux. Ça n’a pas empêché que les Prussiens étaient devant Paris au mois de septembre et qu’ils l’ont pris au mois de janvier.

Dans la salle à manger, les deux frères causaient avec Jacques Bourdeau.

— Voyez-vous, disait ce dernier, il n’y a rien à attendre de la C. G. T. Hier, j’y ai passé l’après-midi. Ils sont tous d’accord pour dire qu’on doit partir si on nous attaque. Nous avons eu beaucoup de visites de syndiqués qui s’attendaient à voir les organisations faire résistance à la mobilisation. Il y a même eu des moments où ça chauffait, je vous assure.

Léon se ressouvint de la scène dont il avait été témoin, et en fit le récit.

— Eh bien, Monsieur Bournef, je peux vous assurer que cette scène-là s’est renouvelée plus d’une fois. Surtout de la part des jeunes, de ceux qui sont célibataires et qui ne sont retenus par rien.

Puis avec un soupir :

— Pour ceux qui, comme moi, ont des responsabilités familiales, c’est différent. On pèse le pour et le