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Page:Vers et Prose, tome 9, mars-avril-mai, 1907.djvu/55

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HÉLÈNE


Sourire de la mer

Hélène est calme comme la mer, et passionnée comme elle. Hélène a ses tempêtes ; mais elles lui coûtent bien moins qu’aux grands rocs qu’elle bat. L’écume est un élément de sa parole. Elle s’orne de ses violences ; elle pleure en souriant. Elle se fait un collier et des amulettes des épaves qu’elle a faites. Elle use en baisant et ne s’use pas. Elle noue le charme de la fragilité au cou de l’indifférence, et sa langueur dénoue. Elle est unie sur les désastres qu’elle cause ; son sourire plan est alors le miroir de l’immense silence. Sa beauté fait naître des douleurs qu’elle ne ressent pas. On se perd pour elle, et elle s’y résigne, ne l’ayant jamais su, ne le voulant qu’à peine.

La mer a tous les âges. Elle est le regard du myosotis à l’aurore. Elle est la pierre précieuse de midi. Elle est le pollen du crépuscule.

La mer ignore la misère infinie de l’algue sous le flot, les transes du goémon qui sèche au soleil, quand les ventricules du varech, par pulsations brèves, éclatent. Hélène, tu méconnais ainsi la misère de l’homme sous la marée du temps. Et que fais-tu de son cœur qui se brise, au soleil de la connaissance ?