Page:Vianey - Les Poèmes barbares de Leconte de Lisle, 1933.djvu/128

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nesque dans la capitale de l’empire Mongol[1]. Il y devint un personnage. Un jour qu’il recevait à sa table le fils de l’empereur Akbar, elle chanta et dansa devant le prince, puis, comme par mégarde, laissa tomber ses voiles. Le prince aussitôt la désira. Mais le père l’avait promise à un autre, et un Musulman tient sa promesse. Le mari emmena sa femme au loin. Le prince alors travailla à la libérer sans qu’elle violât la foi conjugale. Le mari, convié à chasser le tigre, tua le fauve au lieu d’en être tué. Il échappa ensuite aux coups d’un éléphant habilement lancé contre lui. Finalement, des assassins vinrent à bout de ses résistances. Nurmahal, devenue veuve, attendit assez longtemps la récompense du meurtre libérateur. Mais elle fut éclatante. Djiann-Guîr, qui avait succédé à son père, épousa la femme ainsi conquise. Sultane, elle régna sur l’empire, combla de faveurs tous les siens, et l’on voit aujourd’hui son mausolée tout près de celui où repose l’empereur.

L’histoire plaît de toutes façons à Leconte de Lisle.

La trahison de Nurmahal lui rappelle celle dont il a été victime. Aussi, comme il a fait de Çunacépa le portrait de la femme tendre, fidèle, dévouée, qu’il aurait voulu trouver, il prêtera à Nurmahal cette beauté toute sensuelle par laquelle il a été subjugué,

  1. Voir l’histoire de Nurmahal dans l’intéressante thèse de Gladys Falshaw, Leconte de Lisle et l’Inde, Paris, d’Artez, 1923, et dans Vianey, Les Sources de Leconte de Lisle.