répondre, l’essentiel est d’abord de savoir quels documents il a utilisés, et quel emploi il en a fait. L’auteur d’un livre sur les Sources de Leconte de Lisle croit avoir apporté beaucoup d’éléments qui permettent de répondre à la question[1]. Lui-même et d’autres ont complété ces recherches.
Or, elles ont ébranlé la confiance excessive que sur la foi d’un Lemaître, d’un Bourget et d’un Brunetière, on avait accordé au « sens critique » de Leconte de Lisle. Elles l’ont montré, non seulement acceptant comme authentiques (d’ailleurs avec les meilleurs historiens de son temps) des documents qui ne l’étaient pas (Néférou-Ra, le Massacre de Mona), mais modifiant plus ou moins pour satisfaire ses aversions des légendes et des histoires (Vision de Snorr, la Runoïa, etc.). Pourtant, Leconte de Lisle, après ces enquêtes rigoureuses, continue à nous apparaître très curieux des choses du passé et respectueux des documents, au point même d’en tirer jusqu’à des détails qui rebutent le lecteur français. En dépit de leurs réserves, ceux qui ont bien étudié la question, E. Estève, Martino, M. Souriau, M. Buffenoir, ne contestent point que l’auteur des Poèmes Barbares ait eu le goût de l’histoire et l’intelligence des époques[2].