Page:Vianey - Les Poèmes barbares de Leconte de Lisle, 1933.djvu/198

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

La valeur du naturaliste a été, depuis Bourget et Brunetière, ébranlée davantage. Sans doute, nul ne songe à nier que l’auteur du Condor et du Jaguar a une connaissance admirable du physique des animaux, de leur figure, de leurs gestes, de leurs mœurs, du décor où ils se meuvent. Et cette connaissance suppose beaucoup de visites au Jardin des Plantes, beaucoup de lectures.

Mais il ne semble pas que pendant longtemps Leconte de Lisle ait vraiment connu la doctrine de l’évolution[1]. Plusieurs de ses poèmes animaliers sont antérieurs au livre de Darwin (1859). Ils sont, évidemment, animés par cette idée que les animaux ressemblent aux hommes, mais sans que le poète nous conduise à nous demander si c’est d’eux que nous descendons. Et quelques-uns, conformément aux traditions de la poésie, sont peut-être surtout des symboles où l’auteur exprime ses rêves ou ses souffrances.

En même temps que des critiques recherchaient si Leconte de Lisle avait des titres solides aux noms d’historien et de naturaliste, d’autres, ou les mêmes, estimant, avec France, que dans son œuvre ce poète ne révèle jamais qu’une seule chose, ont étudié les caractères, les aspects, les origines de cette chose : l’âme de Leconte de Lisle.

Déjà à la date de 1909, René Doumic, qui dégage les résultats des Derniers Travaux sur Leconte de Lisle, dans

  1. Voir N. Smidt, L’accord de la science et de la poésie dans la deuxième moitié du XIXe siècle, 1928