Page:Viard - Grandes chroniques de France - Tome 8.djvu/94

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et conté qu’il avoit à Nivelle une devine[1] qui merveilles disoit des choses passées et avenir, et estoit en habit de beguine et se contenoit comme sainte femme et de bonne vie. Et si avoit à Laon i autre devin qui estoit vidame de l’eglise de Laon, qui par art de nigromance savoit moult de choses secretes. Et plus avant vers Alemaigne, estoit i convers, qui avoit esté Sarrazin, qui grant maistre et sage se faisait en tiex besoignes, et moult disoit de choses qui sont avenir. « Par Dieu », dit le roy, « aucun trouvera l’en qui nous dira nouvelles de ce fait ». Si appella son clerc qui bien estoit privé et homme secré, et li pria qu’il alast vers Laon et à Nivelle, pour savoir lequel de ces prophétes estoit tenuz au plus sage, et qui miex et plus certainement diroit la verité de ce que l’en li commanderoit.

Le clerc ala à Laon et à Nivelle, et enquist et demanda le plus sagement qu’il pot, lequel estoit tenu à plus sage de tel besoigne. Si trouva que la beguine estoit la plus renommée que les autres et que elle estoit trop miex creue que les autres de ce que elle disoit. Au roy de France s’en retourna et conta tout ce qu’il avoit trouvé. Le roy manda l’abbé de Saint Denis qui avoit non Maci[2], car il se fioit moult en lui, et Pierre,

  1. G. de Nangis présente tous ces devins comme des imposteurs : « Erant duo pseudoprophetæ in Francia, vicedominus Laudunensis ecclesiæ, et quidam Sarabita pessimus, quœdam beguina Nivellensis tertia pseudoprophetissa. Qui nulla religione approbati, Deo mentit, par arctam vitam quam deforis ostendebant, habere prophetiæ spiritum dicebantur. Sed vere spiritus mendax in eorum ore factus multos decepit, et ad credendum eis quamplurimos provocavit. »
  2. Mathieu de Vendôme.