Page:Viard - Grandes chroniques de France - Tome 9.djvu/88

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priveroit du tout en tout du droit de l’Empire, et ainsi donroit au pape voie par quoy il procederoit contre li. Pour quoy il li fu conseillié qu’il les punisist, comme il apartient à emperere non pas seulement deffendre la foy et les crestiens, mais les herites effacier et estreper[1]. Lequel respondi ainsi, si comme on dit. « Ce ne seroit pas humaine chose de metre à mort ceulz qui nous suivent, especiaument ceulz qui ont pour nous laissié leur pays et leur fortune. » Si ne crut pas leur conseil, ainçois les tint près de soy en eulz honnorant de dons et d’autres choses, et leur commanda qu’il fussent en tout temps près de lui. Ces choses ainsi faites vindrent à la cognoissance du pape, lequel, après plusseurs procès par voie de droit faiz contre eulz, geta sentence d’escommeniement[2] sur eulz et sur ledit messire Loys ; laquelle sentence il envoia à Paris et aus autres lieux solempniex pour publier et denoncier.

En cest an, envoia le Saint Pere grant quantité de soudoiers en Lombardie contre Galeace de Milan et les Guibelins qui estoient escommeniez. Et quant il furent assamblez en guerre, touz ceulz du pape furent mis à l’espée, et s’en eschapa à paine celi qui estoit capitaine. Si fu moult courroucié le pape, jasoit ce que plusseurs deissent que à bon droit estoit ceci advenu au pape ; car l’Eglise ne use pas contre ses anemis de

  1. Estreper, détruire.
  2. Jean de Jandun et Marsile de Padoue furent excommuniés par une bulle du 9 avril 1327 (Martène et Durand, Thesaurus novus anecdotorum, t. II, col. 692) et leurs doctrines furent réfutées par une bulle du 27 octobre suivant (Ibid., col. 704, et Raynaldi, t. V, p. 347).