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Page:Viau - Œuvres complètes, Jannet, 1856, tome 2.djvu/150

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Sur le penchant de ma ruine ;
Mais en un péril si pressant
Leur secours fut si languissant
Et ma guarison si tardive,
Que la raison me résolut
A voir si quelque estrange rive
M’offriroit un port de salut.
Je fus long-temps à desseigner
Où j’irois habiter la terre,
Et, sur le poinct de m’esloigner.
Mille peurs me faisoient la guerre :
Car le soleil, qui chaque jour
Faict si vite un si large tour,
Ne visite point de contrée
Où ces chefs de dissentions
Ne donnent aisément l’entrée
A quelqu’un de leurs espions.
Après cinq ou six mois d’erreurs,
Incertain en quel lieu du monde
Je pourrois asseoir les terreurs
De ma misère vagabonde,
Une incroyable trahison
Me fit rencontrer ma prison
Où j’avois cherché mon azile :
Mon protecteur fut mon sergent.
grand Dieu ! qu’il est difficile
De courre avecques de l’argent !
Le billet d’un religieux.
Respecté comme des patentes.
Fit espier en tant de lieux
Le porteur des Muses errantes.
Qu’à la fin deux meschans prevosts ,
Fort grands voleurs et très dévots,
Priant Dieu comme des apostres,
Mirent la main sur mon collet,