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Page:Viau - Œuvres complètes, Jannet, 1856, tome 2.djvu/85

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Depuis que je vous vis, les clartez du soleil
Ne furent plus pour moy qu’une lumière peinte ;
La faveur du plus doux sommeil,
Depuis que je vous sers, n’est pour moy qu’une feinte.
Dans l’estroite prison où demeure un amant.
Et dont je ne croy pas qu’aucun sort me délivre,
Vivre tousjours dans le tourment,
Ce n’est que proprement faire semblant de vivre.
Mes yeux, lors que la nuict aveugle l’univers,
Semblent estre endormis et ne voir plus de flame,
Et toutesfois ils sont ouverts,
Mais c’est vers le soleil qui luit dedans mon ame.
Lors qu’Alcmene eut blessé des traits de son amour
Ce Dieu dont les larcins ont esté si célèbres,
Nature déguisa le jour
Et couvrit tout le ciel d’un manteau de ténèbres.
Si pour un beau dessein il faut se déguiser,
Si le secret d’amour a besoin qu’on le couvre,
On ne me sçauroit accuser
D’estre aujourd’huy le seul qui dissimule au Louvre.


VERS POUR LE BALET DES BACCHANALES[1].


BACCHUS.

Avant que je parusse au jour,
Encore le petit Amour
N’avoit pas le secret de bien charmer les âmes ;
Les hommes ny les Dieux n’aymoient que molement,

  1. Vers pour le ballet des Bacchanalles, de l’imprimerie du Roy, 1623, in-4. — Id. Ballet du Roy sur le sujet des Bacchanalles,dansé au Louvre le 26 de février 1623. Paris, René