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Page:Viau - Œuvres complètes, Jannet, 1856, tome 2.djvu/95

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Et bientost, quoy que tu travailles,
Je ra-arracheray des entrailles
Tout le venin de tes regards.
Sçachant bien que je meurs d’amour,
Que je brusle d’impatience,
As-tu si peu de conscience
Que de m abandonner un jour !
Après ton ingratte paresse,
Si tu n’as que ceste caresse,
Fatale à ma crédulité,
Puisses-tu périr d’un tonnerre,
Ou que le centre de la terre
Cache ton infidélité !
Non, je ne sçaurois plus souffrir
Ceste liberté de ta vie :
Tout me blasme et tout me convie
De me plaindre et de me guérir.
Aussi bien ta beauté se passe,
Mon amitié change de face ;
L’ardeur de mes premiers plaisirs
Perd beaucoup de sa violence :
Ma raison et ta nonchalance
Ont presque amorty mes désirs.
Je sçay bien que la vanité
Qui te fait plaire en mes supplices
Cherche encore dans tes malices
De quoy trahir ma liberté ;
Encores tes regards perfides
Préparent à mes sens timides
L’effort de leur esclat pipeur,
Et, malgré le plus noir outrage.
S’imaginent que mon courage
Devant eux n’est qu’une vapeur.
Mais je fay le plus grand serment
Que peut faire une ame bouillante