Page:Vibert - Pour lire en automobile, 1901.djvu/183

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 155 —

à conserver ainsi son bien-aimé, pour avoir le plaisir de peigner, soigner et parfumer souvent sa belle barbe, soyeuse et fine.

Non, car je sens moi-même l’émotion m’envahir, mais tout au moins qu’il me soit permis de payer ici un juste hommage d’admiration, un équitable tribut de reconnaissance au gendre qui, tous les matins, pleure comme un veau en embrassant sa vieille belle-mère empaillée — pardon, embaumée — sur les deux joues, et mise à la place d’honneur, dans son salon, avant de se rendre au bureau.

Pour peu qu’elle soit un peu de forte corpulence et pas trop desséchée par l’emballeuse, — non, l’embaumeuse — il se figurera facilement, ce gendre modèle, avoir chez lui, comme les anciens, conservé ses Dieux Lares !

Ce sont là des scènes si touchantes que ma plume, impuissante, se refuse à les décrire et à les retracer. Aussi je n’insiste pas.

Si du moins j’avais le bonheur de posséder un fils, j’aurais voulu le donner en justes noces à une jeune et poétique embaumeuse. Il me semble qu’elle serait venue embaumer toute notre existence, tout notre intérieur et puis comme j’aurais été très gentil et très affectueux pour elle ! Il y aurait bien eu là un sentiment d’économie un peu canaille de ma part, car, après ma mort, je suis sûr qu’elle aurait tenu elle-même à embaumer son cher feu beau-père !

Hein ! épatant ce métier ! et si joli et si facile !