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Le vent a redoublé de fureur, et les flots,
Plus courroucés toujours, escaladent la dune.
La douce Vierge ait en pitié les matelots !

IV


Ô mer, ô mer, ô mer, coureuse de fortune,
Chercheuse d’infini par delà les grands monts,
Toi que le soleil brûle et que fleurit la lune ;

Belle au front couronné de sombres goémons,
Nous savons le secret de la tendresse brève,
Et tes yeux sont pareils à ceux que nous aimons.

Tes vagues doucement viennent baiser la grève,
C’est toi la bonne hôtesse au souriant accueil,
La princesse idéale et la dame du Rêve.

Mais le havre tranquille est voisin de l’écueil,
Et sitôt qu’a soufflé le vent de ta colère,
La terre s’inquiète et tremble et prend le deuil.

Courtisane d’amour qui ne songeais qu’à plaire,
Quelle âme de douleur est en toi maintenant ?
Quel brouillard a soudain voilé ta face claire ?

Toi qui riais, joyeuse et libre, à tout venant,
Tu sombres dans la nuit, tu t’embrumes de larmes,
Plus même une lumière à ton front rayonnant.