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sadeur de l’Empereur en France pendant trente ans, et le confident de M. de Kaunitz[1], premier ministre d’Autriche. Elle l’avait consulté sur la première émigration de M. de Lescure, et il lui avait mandé de Bruxelles, où il était alors, qu’il ferait mieux d’attendre jusqu’au printemps au moins, qu’il n’y avait nul préparatif, que les puissances ne feraient la guerre que si on les y forçait, et que ce ne serait sûrement pas de tout l’hiver. Mais M. de Lescure était déjà parti quand cette réponse arriva.

Maman avait reçu par ma tante de Chastellux, qui avait suivi Mesdames à Rome, la dispense du Pape pour mon mariage ; de plus, nous avions alors un curé insermenté, il fallait en profiter, car c’était un grand hasard à cette époque. Il y avait partout des intrus, et comme on ne se mariait pas devant la municipalité, rien n’était plus difficile que de faire reconnaître son union. Nous avions eu d’abord un intrus, c’était un capucin flamand, mais il s’en alla, trouvant très désagréable d’être dans des landes dont il n’entendait pas la langue ; les paysans allèrent demander un curé à l’évêque Pacareau[2] ; cet homme ne croyait à rien, tout par conséquent lui était égal ; il leur dit en riant qu’il n’avait pas de prêtre à leur donner, et qu’ils pouvaient reprendre l’ancien ; ils en obtinrent la permission du district, et notre abbé Queyriaux revint dans la paroisse, mais toujours menacé d’être chassé et souvent insulté par des coquins de la commune, auxquels il opposait une piété et un courage héroïques. Outre ces raisons, la meilleure de toutes pour se presser de nous marier était les sentiments mutuels de M. de Lescure et de moi.

En arrivant, il fut agréablement surpris d’apprendre qu’on

    Conseiller intime et chambellan de l’Empereur, grand-croix de Saint-Étienne de Hongrie, chevalier de la Toison d’or, il mourut ambassadeur à Londres, le 25 août 1794.

  1. Wenceslas, prince de Kaunitz-Rietberg, né en 1710, ambassadeur d’Autriche en France, puis chancelier de cour et d’État, chevalier de la Toison d’or et de Saint-Étienne de Hongrie, mort le 24 juin 1794.
  2. Pierre Pacareau, né à Bordeaux le 2 septembre 1716, curé de la paroisse Saint-André, chanoine de la métropole, puis évêque constitutionnel de la Gironde, mort le 5 septembre 1797.