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M. Baudry d’Asson[1], qui depuis fut tué en 1793, et M. de Calais[2] (a), seuls restés, se mirent à la tête[3], mais ils n’étaient pas en état de commander un homme ; leur seul mérite à tous deux était la bravoure. Ils firent hacher les malheureux paysans, on en tua une centaine qui moururent en criant Vive le Roi ; on en prit cinq cents, le reste se dissipa, et presque tous passèrent l’hiver, errants, dans les bois, toujours dans la crainte d’être arrêtés. Les volontaires massacrèrent un M. de Richeteau[4], il ne périt cependant aucun des prisonniers[5]. Le tribunal de Niort, bien composé, trouva moyen de les acquitter tous peu à peu, en faisant tomber le prétendu crime de l’insurrection sur les morts et sur les absents.

  1. Gabriel Baudry d’Asson, né en 1755, seigneur de Brachain, paroisse de Saint-Marsault, en bas Poitou, fut condamné à mort par contumace, comme brigand de la Vendée, le 26 avril 1793, par la commission militaire séant aux Sables d’Olonne, et fut tué à la bataille de Luçon, le 14 août suivant.
  2. Louis-Joseph de Calais, seigneur de Puy-Louët, né le 13 mars 1749 ; fait prisonnier après Savevay, il échappa heureusement à une condamnation à mort et fut déporté en Espagne, d’où il passa en Angleterre. Il mourut à Puy-Louët, commune des Aubiers, près Bressuire, le 13 août 1823.
  3. Avec eux étaient M. de Feu et Adrien-Joseph Delouche, ancien poêlier à la Châtaigneraie, puis avoué, maire de Bressuire. Celui-ci fut condamné à mort par le tribunal de Niort, le 18 novembre 1792, il avait alors quarante ans. L’arrêt ayant été annulé par la cour de Cassation, Delouche se réfugia à Nantes, où il mourut.
  4. D’après la tradition de la famille, c’était Louis-Alexandre-François de Richeteau, chevalier, seigneur de Villeguay, né le 4 mai 1766, fils de René-Louis-Charles-Henri-Urbain de Richeteau, chevalier, seigneur de la Coindrie et de la Coudre, près Argenton-Château, et de Catherine-Mélanie Hunault de la Chevalerie. Après l’affaire des moulins Cornet, à Bressuire, il se cacha pendant trois jours, puis fut pris et fusillé à Thouars, le 28 août 1792.

    Un de ses frères, René-Louis de Richeteau, né à la Coindrie le 1er septembre 1768, seigneur de la Sevrie, fut condamné et exécuté à Angers le 18 nivôse an II, 7 janvier 1794, comme frère d’un chef de brigands, fusillé au début du soulèvement.
  5. C’est à cette affaire que la garde nationale de Thouars fit son apprentissage de barbarie ; à leur rentrée dans la ville, presque tous ceux qui la composaient apportaient des oreilles, des nez des malheureux qu’ils avaient massacrés, quoiqu’ils fussent sans armes. M. Duchastel*, qui depuis fut envoyé à la Convention, donna une preuve d’humanité : il fit son possible pour empêcher le massacre, mais on égorgea quelques-uns de ces infortunés paysans jusque dans ses bras. (Note du manuscrit.)

*. Gaspard-Séverin Duchastel, né en 1766, à Rochefou, près Argenton-Château. Député des Deux-Sèvres à la Convention, il ne vota ni la culpabilité ni la mort du Roi. Décrété d’accusation, il fut arrêté à Bordeaux, conduit À Paris, et décapité le 31 octobre 1793.