Page:Victor Alfieri, Mémoires, 1840.djvu/15

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

conque. Et cette notice sera vraisemblablement écrite par quelqu’un qui ne m’aura que peu ou mal connu, et qui en ira chercher les matériaux à des sources douteuses ou partiales ; d’où il suit que cette histoire, si elle n’est fausse, sera toujours moins véridique que celle que je puis donner moi-même ; d’autant plus que l’écrivain qui se met à la solde d’un éditeur ne manque jamais de faire un sot panégyrique de l’auteur qui se réimprime, tous deux y voyant un moyen de donner un plus grand débit à leur commune marchandise.

Afin donc que cette histoire de ma vie soit tenue pour moins mauvaise, plus vraie et non moins impartiale que toute autre qu’on pourrait écrire après moi, moi, qui ai pour habitude de tenir plus que je ne promets, je prends ici avec moi-même et avec ceux qui voudront me lire l’engagement de dépouiller toute passion, autant qu’il est donné à l’homme ; et je m’y engage, parce qu’après m’être bien examiné et connu à fond, j’ai trouvé, j’ai cru du moins trouver en moi la somme du bien un peu supérieure à celle du mal. C’est pourquoi si je n’ai pas le courage ou l’indiscrétion de dire sur moi toute la vérité, du moins n’aurai-je pas la faiblesse de dire ce qui ne serait pas la vérité.

Quant à la méthode, pour ennuyer moins le lecteur, pour lui donner quelque repos, et aussi le moyen d’abréger cette histoire, en laissant de côté