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Page:Victor Alfieri, Mémoires, 1840.djvu/312

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ainsi, et nous fumes très-contens l’un et l’autre, lui de me perdre, moi de me retrouver.

Mais je crois juste d’ajouter ici une particularité passablement étrange pour consoler mes ennemis et pour faire rire à mes dépens ceux qui, en s’examinant eux-mêmes, se jugeront moins faibles d’esprit et moins enfans que je ne l’étais. De cette particularité que l’on verra chez moi se reproduire à côté d’actions énergiques qui ne me coûtaient pas, celui qui sait observer de près et réfléchir conclura sans doute que souvent dans l’homme, ou du moins en moi, le nain est près du géant. Le fait est que dans le temps même où j’écrivais la Virginie et le livre de la Tyrannie, dans le temps même où je secouais si vigoureusement, où je brisais les chaînes qui me rattachaient au Piémont, je continuais néanmoins à porter l’uniforme du roi de Sardaigne, quoique je fusse hors de ses états, et que depuis environ quatre ans j’eusse quitté le service. Et que diront les sages quand je confesserai ingénuement la raison qui me le faisait porter ? Il me semblait avoir sous ce costume un air plus avenant et plus dégagé. Riez, lecteur, vous en avez sujet. Et ajoutez, si vous le voulez, qu’en agissant de cette façon puérile et déraisonnable, je préférais sans doute paraître plus beau aux yeux des autres qu’estimable aux miens propres.

La conclusion de mon affaire traîna en longueur depuis janvier jusqu’en novembre de cette année 1778, parce que je stipulai dans une clause dernière, qui fut comme un second traité, l’échange