Page:Victor Alfieri, Mémoires, 1840.djvu/508

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timent louable, de l’amitié, par exemple, dans les endroits où il parle de moi.

C’est pourquoi à tous les motifs que nous avions déjà de nous plaindre que la mort nous l’ait si tôt ravi, il faut ajouter le regret de compter ces mémoires parmi tant de productions demeurées inachevées, et qui auraient eu besoin d’être plus ou moins retouchées ; il n’y aurait pas manqué s’il fût arrivé à sa soixantième année, époque à laquelle il se proposait de reprendre son œuvre, de la perfectionner ou de la brûler. Mais il ne l’aurait pas brûlée, pas plus que nous n’aurions le cœur de le faire, aujourd’hui, heureux de posséder de lui un portrait si ressemblant, le plus sûr document et le seul qui témoigne de tant de faits et de particularités de sa vie.

Je ne puis cependant, madame la comtesse, que vous louer de la sollicitude jalouse dont vous entourez ces mémoires, et vous approuver de vouloir seulement les communiquer à quelques amis intimes et discrets, qui pourront y puiser des notes pour composer l’histoire de ce grand homme. Pour moi, je n’ose l’entreprendre, et c’est à mon grand regret ; mais tous ne peuvent toute chose, et je dois me borner à noter ici, comme je le pourrai, ce qui me semble nécessaire pour compléter, pour justifier le récit incomplet de notre ami. Ses dernières lignes sont du 14 mai 1803. J’emprunterai la suite à ce que vous m’en avez écrit, madame la comtesse, vous qui ayant toujours non seulement les yeux et les oreilles, mais le cœur et l’esprit attentifs à tout