Page:Victor Baudot - Au Pays des Peaux-Rouges.djvu/183

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la tournant entre mes doigts. Je découvris qu’à chaque intervalle de 7 à 8 mains de nouveaux cheveux étaient ajoutés aux autres. J’appelai le vieux et lui dis : « Eh mais ! dites donc ! ces cheveux sont collés bout à bout avec de la poix. — Non, ils ne sont pas collés, dit-il, mais rompus. — Pas du tout, répondis-je ; s’ils étaient rompus, la cassure serait circulaire, tandis qu’elle s’étend en diagonale sur une longueur de deux pouces ; attends, je vais te faire voir la même cassure à chaque sept ou huit mains de distance. » Ainsi fut fait, et je jetai la corde en disant : « C’est une insigne supercherie. » Dans la loge voisine se trouvait un grand chef avec une douzaine de guerriers ; j’entrai et je dis : « Cette longue chevelure n’est composée que de cheveux ajoutés bout à bout ; c’est la plus grande tromperie que j’aie jamais vue ; et si vous me prouvez que les cheveux sont d’une seule pièce, je vous donne ma tête à couper. » Ils ne répondirent rien et je m’en allai.

Démasquer ainsi les fraudes est une leçon qui vaut le meilleur sermon pour ouvrir les yeux des imposteurs et de leurs dupes.


XIII.

Le sacrifice au Soleil ou la loge de médecine.



La « loge de médecine » est la plus grande solennité religieuse des Pieds-Noirs ; elle dure encore et durera aussi longtemps qu’il y aura de vieux Indiens obstinés ou que le gouverneur tolérera cet usage.

C’est un sacrifice au soleil qui se célèbre chaque année par suite de quelque vœu : par exemple un sauvage tombe-t-il gravement malade, sa femme sort de la tente dès l’aube et promet au soleil que si son mari revient à