Page:Victor Baudot - Au Pays des Peaux-Rouges.djvu/192

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il faudra les abattre avec un bâton ou se piquer les doigts. »

Un jour d’été, le Napi voyageait avec sa peau de buffalo. Passant près d’un rocher, il s’arrêta et se reposa quelques instants, puis en partant il fit cadeau de sa fourrure au rocher. Plus loin il rencontra un loup avec lequel il continua sa route. Le temps était couvert et il commençait à pleuvoir. Le Napi envoya le loup reprendre sa peau de buffalo sous laquelle ils s’abritèrent tous deux. Mais bientôt ils entendirent derrière eux un grand fracas : c’était le rocher qui les poursuivait, roulant, roulant très vite. Le loup se cacha sous terre, dans un trou. Le Napi s’enfuit à toutes jambes et rencontra des buffalos : « Mes frères les buffalos, cria-t-il, défendez-moi contre. cette grosse pierre. » Mais les buffalos ne lui vinrent pas en aide. Il invoqua le secours de plusieurs autres animaux, mais tous avaient peur et passaient leur chemin. Enfin il vit des hirondelles et les pria de le secourir. Une hirondelle donna un coup de bec au rocher et en fit sauter un morceau ; les autres l’imitèrent ; à force de coups de bec, le rocher se fendit en deux et s’arrêta et le Napi fut sauvé. De là vient qu’aujourd’hui encore lorsque les Pieds-Noirs voient des allées de pierres dans la prairie, ils disent : « Ces pierres sont tombées là pendant la fuite du Napi. » Et quant aux roches dispersées çà et là sur le sol, ils croient qu’elles roulent et changent de place pendant la nuit ; plusieurs même affirment qu’ils en ont vu rouler.[1]

Le Napi est représenté dans les légendes comme un génie malfaisant. Un jour par exemple il entra dans une tente où logeaient deux vieilles femmes avec leurs deux

  1. Comparer les légendes bretonnes par rapport aux menhirs aux pierre roulantes et au loup-garou.