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SIX ANS AUX MONTAGNES ROCHEUSES

néral de la foule était à peu près le même que chez les Cœurs d’Alêne : même mosaïque de costumes aux couleurs éclatantes, mêmes visages cuivrés, encadrés de longs cheveux noirs, avec cette différence qu’il y avait dans l’assemblée plus de visages pâles, c’est-à-dire de Canadiens-français. Après la messe, les enfants, garçons et filles, retournaient à l’école, la foule se dispersait et nous retombions dans notre solitude pour toute une semaine que j’employais à l’étude acharnée de la langue.

L’école comptait à cette époque une centaine d’enfants, la plupart métis ou quarterons. J’y allais dire la messe le matin, parfois je donnais une instruction aux religieuses  ; c’était toute l’occupation qui me venait de ce côté.

D’autre part il n’y avait guère à songer à des promenades aux environs  ; les chemins étaient rendus impraticables par la boue d’abord, par la neige ensuite. Il ne me restait d’autre ressource que l’étude.

Les fêtes de Noël vinrent pourtant faire diversion  ; dès la veille un certain nombre d’indiens arrivèrent à cheval, en voiture, précédés ou suivis de leurs chiens, sans lesquels ils ne voyagent jamais. Quelques tentes s’élevèrent autour de l’église, et le soir venu je pus voir de ma fenêtre la lueur rougeâtre des feux qui les éclairaient à l’intérieur.

L’année précédente je me trouvais pendant cette nuit de Noël au milieu du tumulte, des chants, des bruits d’instruments de toutes sortes par lesquels les habitants des quartiers populaires de Gênes célèbrent cette grande fête. Par un brusque changement de décor, je la célébrais cette fois au fond d’un désert, dans le silence et la solitude.

À la grand’messe le lendemain, le P. de la Motte qui était venu passer les fêtes avec nous, prêcha par inter-